Management : Changer les règles du jeu avant de changer les managers ?
management

Management : Changer les règles du jeu avant de changer les managers ?

Depuis la crise sanitaire, les discours sur le « nouveau management » se multiplient. On parle d’autonomie, de confiance, de sens, de bien-être… Pourtant, dans bien des organisations, les pratiques managériales semblent inchangées. Alors, que s’est-il passé ? Et surtout, où se situe le vrai levier de transformation : dans les individus ou dans le système ?

Une révolution managériale annoncée… mais inachevée

La pandémie a agi comme un révélateur. Elle a mis en lumière les limites du management traditionnel, fondé sur le contrôle, la proximité physique et la verticalité. Beaucoup ont espéré un tournant : vers plus d’agilité, de responsabilisation, de coopération. Les managers ont été appelés à se réinventer, à se former, à « changer de posture ».

Mais cette révolution annoncée s’est souvent heurtée à un mur : celui des organisations elles-mêmes. Car on ne peut pas demander à un manager d’être autonome et responsabilisant… tout en le soumettant à des processus rigides, des indicateurs contradictoires et des circuits de décision verrouillés.

Le management, produit du système

Le cœur du problème est là : le management ne se transforme pas par la seule volonté des individus. Il est le reflet d’un cadre organisationnel. Les comportements managériaux sont largement conditionnés par les règles du jeu : reporting, gouvernance, marges de manœuvre, reconnaissance, outils…

Former les managers sans revoir ce cadre revient à leur demander de jouer un rôle impossible. C’est comme vouloir faire du management horizontal dans une organisation verticalisée. Le risque ? L’épuisement, la perte de sens, et une forme de dissonance entre les discours et les actes.

management 2

Repenser les règles du jeu

Si l’on veut vraiment faire évoluer le management, il faut s’attaquer aux fondations. Cela implique de revoir :

Les processus de décision : qui décide, comment, et avec quel niveau d’autonomie ?

Dans de nombreuses organisations, les décisions importantes restent centralisées, ce qui limite l’autonomie des équipes. Repenser les processus, c’est permettre aux managers de prendre des décisions à leur niveau, en cohérence avec leur périmètre d’action. Cela suppose de clarifier les responsabilités, de fluidifier les circuits de validation, et de faire confiance aux compétences locales.

Les indicateurs de performance : mesurent-ils la coopération, la qualité relationnelle, le sens ?

Si les KPI restent centrés sur la productivité individuelle ou le respect des délais, ils risquent de décourager la coopération, l’innovation ou la qualité relationnelle. Il est temps d’intégrer des indicateurs plus systémiques : qualité du climat d’équipe, capacité à résoudre des problèmes collectivement, satisfaction des collaborateurs, impact réel sur les clients ou les usagers.

Les outils de pilotage : permettent-ils de soutenir l’initiative ou renforcent-ils le contrôle ?

Les outils numériques, les tableaux de bord, les systèmes de reporting doivent aussi être pensés comme des facilitateurs. Trop souvent, ils deviennent des instruments de contrôle excessif, qui rigidifient les pratiques. Un bon outil de pilotage doit offrir de la lisibilité, de la souplesse, et permettre aux managers de piloter avec discernement, pas seulement de rendre des comptes.

La gouvernance : favorise-t-elle la subsidiarité ou la centralisation ?

La gouvernance définit les règles implicites du pouvoir et de la légitimité. Une gouvernance trop verticale empêche les managers de jouer pleinement leur rôle. À l’inverse, une gouvernance fondée sur la subsidiarité, c’est-à-dire la capacité à déléguer au plus proche du terrain, favorise l’engagement, la réactivité et la responsabilisation. Cela implique aussi de revoir les rôles des fonctions support, souvent trop prescriptives.

C’est à ces niveaux que les dirigeants ont un rôle clé à jouer. Non pas en imposant un « nouveau management », mais en créant les conditions pour qu’il puisse émerger.

Le management ne se révèle pas être une affaire de posture individuelle, mais bien de transformation systémique. Il ne s’agit pas de changer les managers, mais de leur permettre d’exercer pleinement leur rôle. Cela suppose obligatoirement de faire évoluer les règles du jeu, les structures, les outils, les cultures… En un mot, libérer les managers, pour qu’ils puissent réellement manager.

Notre expert sur le sujet 

Geoffrey CARPENTIER

Partner

Partager
Découvrez aussi